Square Enix continue de réactualiser ses anciennes gloires en les passant à la moulinette du HD. Cette fois, c’est SaGa Frontier qui passe sous le bistouri pour se mettre au goût du jour. C’est la première fois que l’aventure sera jouable en Europe puisque le titre original avait boudé notre territoire à la fin des années 90. Mais l’attente en valait-elle la peine ?

 

SaGa ? Connais pas !

 

Avant d’aborder le jeu en lui-même, un petit historique de la série SaGa s’impose. La série a débuté sur Game Boy en 1989 sous l’impulsion d’Akitoshi Kawazu avec le jeu Makai Toushi SaGa – qui sera renommé Final Fantasy Legend en Amérique afin de surfer sur la popularité de la licence phare de Square. Le jeu connaîtra deux suites, toujours sur Game Boy en 1990 et 1991. Viendront ensuite les trois Romancing SaGA, puis SaGa Frontier 1 et 2. Le dernier jeu en date étant SaGA Scarlet Grace sorti en 2016 sur PSVita.

La licence se démarque par son univers typé science-fiction, son système de combat particulier et son absence de scénario global, préférant multiplier les histoires et les embranchements. Véritable ovni dans le monde du JRPG, SaGa est unique en son genre pour le meilleur et pour le pire. Akitoshi Kawazu contribuera d’ailleurs à la naissance d’un autre jeu particulier : The Last Remnant. Le non-conformisme est donc l’une de ses marques de fabrique ! Assez peu connus par chez nous, car resté exclusifs au Japon de longues années, les SaGa tentent aujourd’hui de se faire une place parmi le reste du catalogue Square via cette version Remastered du premier SaGa Frontier.

 

 

C’est l’histoire d’un mec… Non, huit en fait !

 

Résumer l’histoire de SaGa Frontier n’est pas aisé tout simplement parce que le jeu n’a pas vraiment de scénario « unique ». Lorsque vous démarrez une partie, vous avez le choix entre sept personnages – le huitième, Fuse, ne se débloque qu’une fois l’un des sept autres scénarios complété – totalement différents ayant chacun leur propre arc narratif. Les thématiques abordées, ainsi que l’ambiance, varient grandement d’un personnage à l’autre et vous mettront à tour de rôle dans la peau d’un super-héros en quête de vengeance, d’une espionne à la recherche d’un meurtrier, d’un magicien voulant obtenir le sort suprême ou bien encore d’un robot désirant achever sa mission. SaGa Frontier peut donc être considéré comme huit mini-RPGs se déroulant dans le même univers plutôt qu’un jeu vous racontant une seule histoire avec plusieurs points de vue.

 

Test : SaGa Frontier Remastered
L’écran titre vous présente nos huit héros

 

Les héros n’ont quasiment aucune interaction entre eux et certains personnages secondaires peuvent même être recrutés dans plusieurs scénarios. On a donc l’impression de parcourir plusieurs histoires parallèles sans fil conducteur pour les lier. On refait donc plusieurs fois les mêmes zones avec les mêmes ennemis et coffres, ce qui peut vite créer un sentiment de redondance, voire d’ennui si on enchaîne les scénarios à la suite. D’autant plus que tous les chapitres n’ont pas bénéficié du même soin. Le scénario de Red est une ligne droite durant sa première moitié (environ 6h) et ne vous autorise pas à revenir en arrière – ce dont nous reparlerons – alors que le scénario d’Emilia est très libre mais se termine en seulement 4h (et possède une fin ratée). Il y a toutefois un point commun à toutes ces aventures : leur écriture. Les dialogues – intégralement en anglais – sont d’une pauvreté assez étonnante surtout pour un jeu sorti la même année que FF VII (1997 au Japon) ! Les scènes s’enchaînent parfois sans aucune logique, les antagonistes n’ont pas de motivations claires et définies, ce qui peut créer un certain désintérêt de la part du joueur qui se concentrera sur les autres aspects du jeu…

 

Test : SaGa Frontier Remastered
Test : SaGa Frontier Remastered
Test : SaGa Frontier Remastered

 

Mais… Y’a pas de niveaux ?

 

Le système de combat de SaGa Frontier est très particulier. Point de niveaux ou d’expérience ici, vos statistiques s’améliorent toutes seules au gré des combats – un peu à la manière d’un Final Fantasy II. Plus vos adversaires seront puissants, plus vos caractéristiques (force, intelligence, HP…) augmenteront. Il s’agira donc de combattre régulièrement pour ne pas se retrouver démunis face aux boss plutôt costauds et sans aucune pitié ! Les choses ne s’arrêtent cependant pas là et le jeu propose un système appelé « Glimmer ». Il arrive régulièrement qu’un personnage ait une « révélation » en plein combat – symbolisée par une ampoule au dessus de sa tête – lui permettant d’apprendre une nouvelle technique. Se débloquant de manière totalement aléatoire, ces techniques sont très nombreuses et dépendent des personnages mais aussi de leur équipements. Vous avez également la possibilité de recruter des monstres et des robots qui eux apprennent de nouvelles compétences à la manière du mage bleu de FF : à chaque fois qu’ils subissent une attaque, ils ont une chance de l’apprendre en fin de combat. Autant vous dire que les fous du 100% vont passer de très nombreuses heures pour tout découvrir. Dommage qu’une fois les techniques les plus puissantes apprises, on ne se serve plus des autres.

 

 

Alkaiser vient d'apprendre une nouvelle attaque !
Alkaiser vient d'apprendre une nouvelle attaque !
Vous pouvez parfois déclencher un combo dévastateur en concentrant vos assauts sur un ennemi
Vous pouvez parfois déclencher un combo dévastateur en concentrant vos assauts sur un ennemi
Vous choisissez les membres de l'équipe et leur placement au bébut de chaque rencontre
Vous choisissez les membres de l'équipe et leur placement au bébut de chaque rencontre

 

Si les combats de SaGa Frontier sont plaisants – et figurent assurément parmi les points forts du jeu – on ne peut pas en dire autant de la navigation et des menus. C’est bien simple, le jeu ne vous explique quasiment rien. Les explications sur la magie sont confuses et leur obtention nécessite d’accomplir des quêtes sans que l’on ne vous aiguille sur l’endroit où chercher. La plupart des objets et techniques nécessiteront d’être utilisés en combat pour en comprendre le véritable fonctionnement. Pour l’anecdote, votre serviteur a découvert seulement à la fin de sa première partie que les potions servaient également à ressusciter les alliés KO par exemple… Ceci nous amène à aborder l’un des points les plus critiquables du jeu : sa gestion de la difficulté.

 

Test : SaGa Frontier Remastered

 

SF est dur mais pour de mauvaises raisons. Par moment, vous vous retrouverez dans certaines situations qui, si vous ne les franchissez pas comme le jeu l’a décidé, vous mèneront à un game over. Le manque d’indications vous jouera également des tours. Exemple tout simple : vous parlez à un PNJ, sauf qu’il s’agissait en fait d’un personnage important lançant la suite de l’aventure. Résultat, impossible de visiter le reste de la zone ou de retourner en arrière. Vous êtes donc condamnés à avancer ou à recharger votre partie. Petit conseil d’ailleurs : sauvegardez TOUT LE TEMPS. Vous éviterez les mauvaises surprises et les pertes de temps inutiles. Comme lorsque arrivé à la fin d’un donjon particulièrement pénible, vous prenez le mauvais embranchement qui vous téléporte à l’entrée de celui-ci… Un ajout de cette version Remastered vient toutefois atténuer la difficulté générale, le New Game +. Lorsque vous terminez un scénario, vous pouvez commencer les suivants en gardant tout ce que vous aviez acquis: argent, objets, équipements, statistiques… ce qui permet donc d’aborder les autres parties de manière plus tranquille (après avoir bien galéré une première fois tout de même). Totalement optionnelle, cette fonctionnalité est entièrement paramétrable. Vous pouvez choisir de ne conserver que vos techniques par exemple.

 

Test : SaGa Frontier Remastered
Chaque scénario vous permettra de recruter énormément de personnages en fouillant bien. De quoi varier les plaisirs !

 

Un (presque) sans-faute artistique

 

La bande-son de SaGa Frontier est assez exceptionnelle. Signée Kenji Ito, elle a le mérite de toujours taper juste et accompagne parfaitement l’action. Le jeu proposant pléthore de situations allant du comique au tragique, le compositeur use d’une variété de style remarquable et parvient à créer une ambiance et un sentiment propre à chaque lieu ou personnage. Les combats ne sont pas en reste et alternent thèmes épiques et électro endiablé pour former un tout qui force le respect.

 

 

Les personnages, à défaut d’être bien écrits, possèdent un design fantastique grâce au style coloré et envoûtant de Tomomi Kobayashi. Principalement rattachée à la série des SaGa, cette artiste mérite sans aucun doute sa place aux côtés de Yoshitaka Amano tant ses œuvres parviennent à nous faire rêver à leur simple vue. Dommage qu’elles ne soient pas plus présentes en jeu… Les décors quant à eux sont plutôt classiques et peu de lieux sont véritablement marquants. Il arrive régulièrement que des soucis de lisibilité viennent entacher l’exploration, la rendant de ce fait peu agréable, aussi bien visuellement que ludiquement parlant. Surtout que les sprites des personnages s’intègrent de manière peu harmonieuse avec les environnements. Aucun souci d’un point de vue technique en revanche, le jeu est fluide et ce même lorsque le mode accéléré – un autre ajout de ce remaster – est activé.

 

Test : SaGa Frontier Remastered
Test : SaGa Frontier Remastered
Test : SaGa Frontier Remastered

 

Un JRPG à picorer

 

Difficile, obscur, parfois même punitif, SaGa Frontier n’est pas un jeu à mettre entre toutes les mains. S’il peut renvoyer une impression de jeu « non fini » de part ses dialogues expédiés, ses transitions abruptes et son manque d’explications, il est sauvé par sa partie sonore et ses combats qui, une fois maîtrisés, deviennent vite addictifs. Malheureusement, le jeu est également plombé par son aspect répétitif lorsqu’il vous force à refaire les mêmes donjons où à recruter un coéquipier pour la quatrième fois… Notre conseil ? Faites des pauses entre chaque scénario étant donné qu’ils ne sont pas liés. Ainsi vous pourrez reprendre avec un autre personnage plus tard et limiter le côté redondant du titre qui offre tout de même de bons moments.

 

Test : SaGa Frontier Remastered

6/10

Véritable retour à une époque où les JRPGs demandaient beaucoup d'investissement, SaGa Frontier Remastered se montrera sans pitié pour quiconque le sous-estimera. Sauvegardes fréquentes, séances de levelling, donjons tortueux et boss retors seront votre lot. Le jeu en vaut toutefois la chandelle et mérite que l'on passe outre ses défauts pour découvrir son système de combat unique en son genre. Cette version Remastered propose en plus nombre d'ajouts pour fluidifier un peu l'expérience globale. À réserver aux amateurs de challenges et de sensations old-school.

Dreams

  • Une bande-son au top
  • Le chara-design
  • Énormément de personnages secondaires à recruter
  • Un système de combat riche...

Nightmares

  • ... Mais dur à appréhender
  • Des dialogues sans grand intérêt
  • Une absence de véritable but global
  • Une difficulté parfois mal dosée et punitive
  • Des décors passables et peu lisibles