C’est la rentrée ! Pour beaucoup, cela signifie reprise du train-train quotidien, des cours ou du travail… Mais cela veut également dire que l’équipe de FFDream reprend du service après cette pause estivale ! Et quoi de mieux pour fêter cela que de parler d’un jeu rempli de mort, de tristesse et de dépression ? Pour ce Reset de rentrée, enfilez votre armure et affûtez vos armes car on va parler de Valkyrie Profile : Lenneth !

 

En 1995, Wolfteam, une petite société de développement, cherche un éditeur pour son prochain jeu, Tale Phantasia. Après avoir discuté avec Enix, les papas de Dragon Quest, l’équipe signe finalement avec Namco. Cependant tout ne se passera pas comme prévu et l’éditeur demandera de nombreux changements à commencer par le titre qui deviendra Tales of Phantasia. Plus qu’irrités par ces modifications, une partie de Wolfteam quittera le navire pour fonder Tri-Ace. S’en suivront les sorties de Star Ocean et Star Ocean : The Second Story, premiers épisodes d’une série toujours appréciée, puis de Valkyrie Profile le 22 décembre 1999 au Japon et édité par Enix cette fois. Le jeu aura le droit à un portage aux USA l’année suivante grâce à Sony Interactive mais boudera notre territoire…

 

Valkyrie Profile : Lenneth, divine idylle

 

Le jeu a été dirigé par Yoshiharu Gotanda qui désirait un système de jeu nécessitant d’entraîner des héros avant de les envoyer au Valhalla. Le contexte de la mythologie nordique s’est donc imposé comme une évidence. Au départ pensé comme un jeu de stratégie, Valkyrie Profile s’est changé en Action-RPG assez rapidement. Aux yeux de Gotanda, le gameplay était prioritaire sur tout le reste et a donc été peaufiné et terminé bien avant le scénario. Dans une interview, il déclarera qu’il avait d’ailleurs du mal à rendre chaque détails cohérents pour que tous les éléments scénaristiques s’emboîtent parfaitement. C’est une des raisons pour laquelle de nombreux mystères ne sont pas résolus une fois l’aventure terminée. Mais rassurez-vous cela ne gâche aucunement le plaisir de jeu.

 

Les joueurs européens pourront découvrir tout cela par eux-mêmes avec la sortie de Valkyrie Profile : Lenneth sur PSP le 27 avril 2007. Réédition accompagnée de scènes supplémentaires mais intégralement en anglais. C’est sur cette version que se base ce Reset.

 

Le jeu est également disponible sur Android et IOS depuis 2018.

 

 

Reject your fate

 

Après un prologue vous montrant les derniers instants d’une jeune fille que sa mère a vendue à des marchands d’esclaves, nous assistons au réveil de Lenneth Valkyrie, l’une des trois déesses du Destin. Celle-ci se voit confiée par Odin la mission de descendre sur Terre pour recruter des Einherjar afin de grossir l’armée des Dieux en vue du Ragnarök. Sorte d’Apocalypse dans la mythologie nordique, le Ragnarök signe la fin des Dieux dans une dernière bataille dantesque. Quant aux Einherjar, ce sont des guerriers humains jugés dignes d’accéder au Valhalla après leur mort pour assister Odin et son armée.

 

Valkyrie Profile : Lenneth, divine idylle
Si c’est Odin qui le demande…

 

Lenneth sortant tout juste d’un long sommeil, Freya, l’assistante du souverain des Dieux, vous accompagne pour ce qui vous servira de tutoriel mais également d’avant-goût de ce qui vous attend dans le jeu : des combats et des morts, le tout dans une ambiance mélancolique. Ainsi votre première action sera d’assister au destin funeste d’Arngrim et Jelanda qui deviendront vos alliés après leur trépas. Suite à cela, vous accéderez à un donjon vous permettant d’entraîner vos nouvelles recrues avant de partir en quête d’un autre candidat…

 

Valkyrie Profile : Lenneth, divine idylle
Profitez bien de la puissance de Freya, vous ne la reverrez pas de sitôt…

 

Vous alternerez donc phases de recrutement, qui consistent à suivre les derniers instants de votre futur Einherjar, puis donjon pour l’entraîner. Chaque chapitre se conclut sur une phase ou Freya revient sur vos actions, vous donne des nouvelles des guerriers que vous avez envoyé et vous donne vos ordres de missions pour le chapitre suivant. Le tout sera entrecoupé de scènes vous montrant que tout ne va pas si bien au Valhalla, laissant présager qu’un autre destin est possible pour notre Valkyrie… Ces passages seront aussi l’occasion de croiser certaines divinités plus ou moins connues comme Thor, Loki ou Hodur et d’apprécier leurs designs. L’équipe s’est d’ailleurs autorisée quelques écarts comme Frei qui est ici une femme.

 

Frei version Valkyrie Profile...
Frei version Valkyrie Profile...
...Et la version originale
...Et la version originale

 

Le jeu bénéficie d’un travail d’écriture remarquable. Si les dialogues mettant en scène Lenneth ou les Dieux sont intrigants et donnent envie de connaître le fin mot de l’histoire, ce sont les séquences dédiées aux Einherjar qui vous marqueront à coup sûr. Bénéficiant d’un soin incroyable, elles parviennent à donner assez d’informations sur les personnages pour que l’on comprenne leurs motivations et que l’on soit touchés par leurs morts toutes plus tristes les unes que les autres. Autant vous dire que les plus sensibles d’entre vous auront besoin d’une boîte de mouchoirs ! Cet attachement presque immédiat vous mettra d’ailleurs devant des choix difficiles lorsque viendra le moment d’envoyer vos guerriers à Freya. Ces derniers peuvent d’ailleurs mourir si vous ne les entraînez pas assez avant, de quoi occasionner de nouvelles larmes…

 

Valkyrie Profile : Lenneth, divine idylle
Lenneth n’est pas là pour rigoler !

 

Vous l’aurez compris l’ambiance de Valkyrie Profile est assez lourde et triste. Nulle place n’est laissée pour les personnages comiques ou les tenues cachées d’écolières si chères aux amateurs de fan-service. Il n’y a pas de quêtes annexes et le jeu ne vous laisse que rarement respirer ce qui peut vite être déprimant lorsque l’on assiste sixième décès de la journée. Votre aventure durant approximativement 30 heures, mieux vaut être prêt mentalement avant d’accompagner Lenneth dans sa quête !

 

La « vraie » fin

 

Valkyrie Profile possède 3 fins appelées A, B et C. Si les B et C ne sont pas difficiles à voir, la A ne se montrera qu’avec l’aide d’un guide tant les actions nécessaires pour son obtention sont totalement contre-intuitives. Cela est dû à la vision particulière du directeur Yoshiharu Gotanda. Dans cette interview, il déclarait trouver les jeux actuels trop « gentils » avec le joueur. Tutoriels, indices, aides… Les jeux en débordait au point qu’il n’y avait plus vraiment besoin de réfléchir. Gotanda a donc fait cette fin A pour ceux qui aiment se creuser la tête et remettre en cause les choses. Et tant pis, si la plupart des joueurs ne verraient que la fin B. Cette vision un peu extrême des choses se ressentira dans les autres aspects du jeu, mais nous aurons l’occasion de l’aborder. Dans tous les cas, nous vous recommandons de jouer normalement la première fois pour le plaisir de la découverte et d’utiliser un guide pour votre seconde partie !

 

Come to me dark warriors !

 

Valkyrie Profile : Lenneth, divine idylleSur le papier, Valkyrie Profile est plutôt simple. En début de chapitre Freya vous indique quel type d’Einherjar elle veut puis vous vous retrouvez sur la carte du monde. Il ne vous reste plus qu’à presser la touche Start pour trouver un nouvel endroit à explorer qui s’avérera être le lieu d’un recrutement ou un donjon. En apparence assez simple, cette boucle de gameplay vous obligera pourtant à maîtriser sur le bout des doigts les systèmes de combat, d’évolution et de déplacement du jeu.

 

Lorsque Lenneth descend dans le monde des Hommes, l’exploration adoptera une vue de côté (scrolling 2D). Notre vierge guerrière peut courir, sauter et frapper mais également lancer des projectiles qui gèlent les ennemis – ce qui vous permet de les utiliser comme plate-forme – ou créent des cristaux sur les surfaces qu’ils touchent. Vous devrez donc régulièrement créer vos propres plate-formes pour progresser ou récupérer certains coffres. Si le début du jeu sert d’entraînement, certains passages vers la fin nécessitent une précision presque chirurgicale et des réflexes affûtés et ce pendant plusieurs minutes. De quoi rendre fous les plus impatients ou les moins habiles… Ajoutez à cela que la poussière libérée par l’explosion des cristaux vous permet de flotter dans les airs de courts instants et vous obtenez des casse-têtes infernaux. Heureusement cela concerne principalement l’obtention de certains coffres et ne devrait pas trop vous gêner si vous désirez juste finir l’histoire.

 

Valkyrie Profile : Lenneth, divine idylleToute cette frustration pourra être évacuée lors des nombreux combats qui parsèment l’aventure. Les affrontements se déroulent au tour par tour. Chaque personnage se voit attribuer une touche selon son emplacement (croix, carré, rond et triangle) et peut frapper entre 1 et 3 fois selon son arme. Lors de votre tour, vous n’avez qu’à presser une touche et le guerrier associé attaquera. Au début, vous aurez tendance à matraquer plusieurs fois les boutons pour que tout le monde se jette à l’assaut sans pitié puis vous commencerez à remarquer quelques subtilités comme le fait que certaines attaques envoient les ennemis en l’air ou que la magie brise leurs gardes. Il s’agira alors de trouver vos propres enchaînements afin de faire monter non seulement la jauge de combo – ce qui augmente également l’XP obtenue en fin de combat – mais aussi celle de PWS (pour Purify Weird Souls). Lorsque cette jauge est remplie, vous pouvez déclencher la super attaque du personnage de votre choix ce qui occasionne de gros dégâts imparables. Et si par chance cette attaque remplit de nouveau la jauge, vous pouvez enchaîner sur une autre et ainsi de suite. Simples à comprendre mais complexes à maîtriser les combats de Valkyrie Profile sont rapides, impressionnants et jouissifs. Le fait que le joueur soit vraiment actif durant les batailles font que l’on ne s’en lasse pas contrairement à certains JRPGs plus classiques.

 

Valkyrie Profile : Lenneth, divine idylleDernier point à aborder, le système d’évolution. Là encore les développeurs ont voulu aller à contre-courant des tendances de l’époque. Dans la plupart des JRPGs, la puissance de vos héros est grandement déterminée par leurs niveaux. Mais pas pour VP qui peut être fini avec une équipe de niveau 20. Ici ce sont les skills de vos personnages et leurs équipements qui feront la différence. Les premiers sont des capacités que vous pouvez attribuer à vos combattants et qui offrent tout un tas d’effets comme de la régénération de PV entre chaque tour, des attaques supplémentaires et même une chance de ressusciter automatiquement en cas de KO ! Autre point à ne pas négliger votre équipement. L’absence de boutiques dans le jeu vous obligera chercher vos armes et armures dans les donjons. Heureusement vous pourrez compter sur la transmutation pour vous créer des équipements surpuissants. Disponible dans le sous-menu « Divine Item », la transmutation est un passage quasi-obligé pour surmonter les combats les plus difficiles. Il s’agit là encore d’une volonté des développeurs qui souhaitaient que les joueurs soient libres dans l’évolution de leurs équipes. Si ces aspects peuvent être survolés pour finir le jeu en mode Normal, ils seront essentiels à votre réussite en Hard.

 

Vous passerez de longs moments dans ce menu !
Vous passerez de longs moments dans ce menu !
Ne négligez pas la magie, elle est extrêmement puissante
Ne négligez pas la magie, elle est extrêmement puissante
Les menus sont l'occasion d'admirer les superbes artworks
Les menus sont l'occasion d'admirer les superbes artworks

 

Seraphic Gate

 

Après avoir fini le jeu une première fois, vous débloquerez l’accès à la Seraphic Gate depuis le menu principal. Il s’agit d’un donjon rempli de monstres et de boss très puissants dont l’Ethereal Queen (qui est présente dans quasiment tous les jeux Tri-Ace) ou les mortels… Hamsters. Nombreux, résistants à la magie et difficiles à toucher à cause de leur petite taille, ces rongeurs décimeront en éclair quiconque les sous-estimera !

 

Valkyrie Profile : Lenneth, divine idylle

 

Ce donjon bonus est également l’occasion de recruter de puissants personnages comme Freya ou Brahms, à condition d’avoir récupéré les 8 Flame Jewel cachés dans les 8 donjons exclusifs au mode Hard. Ces niveaux sont de véritables labyrinthe rempli de monstres puissants et d’énigmes retorses, mais ce sont aussi d’excellentes zones pour faire du level-up et aborder la fin avec un peu plus de sérénité.

 

Une direction artistique divine

 

Les musiques sont signées Motoi Sakuraba (Golden Sun, les Tales of, Dark Souls…) et sont un ravissement pour les oreilles. Le thème des combats est exceptionnel à ce niveau et figure facilement parmi les meilleurs du genre. Les scènes de dialogues ne sont pas en reste et l’ost contribue à nous plonger l’univers du jeu. Bref c’est un sans-faute musical. Le doublage s’avère de bonne qualité lui aussi et les répliques de Lenneth vous resteront en tête de longs mois !

 

 

Concernant l’aspect graphique du jeu, il y a du bon et du moins bon. Si d’un point de vue technique les environnements sont propres, certaines zones semblent avoir bénéficié de moins d’attention. Ainsi la tour de Lezard Valeth ou Asgard impressionnent par leurs arrière-plans détaillés alors que les ruines ou autres cavernes sont assez ternes et basiques… Mais tout cela passe totalement inaperçu durant les conversations qui mettent en avant les sprites détaillés des protagonistes et leurs incroyables portraits. Le chara-design, réalisé par les frères Kou et Yoh Yoshinari, est une franche réussite. Le duo a su s’approprier l’esthétique occidentale de la mythologie nordique pour nous offrir des personnages à l’aura divine. Les personnages ont une classe et un charisme rarement égalés depuis (à part Llewelyn). Quant à Lenneth, peu d’héroïnes peuvent se targuer d’avoir autant de charisme. Non sexualisée inutilement, capable de se défendre et de prendre en main son destin seule, il s’agit assurément d’un des meilleurs personnages féminins de JRPG.

 

Lenneth, reine du caméo

 

Lorsque l’on crée une figure aussi marquante que Lenneth, l’envie de la réutiliser est très forte. Les développeurs ne résisteront pas longtemps à la tentation et notre Valkyrie reviendra dans Star Ocean 3 sous la forme d’une Menodix, sorte d’enfant-chat. Elle sera ensuite recrutable dans Radiata Stories et sera évoquée dans les remakes des deux premiers Star Ocean. 

Valkyrie Profile : Lenneth, divine idylle

 

Tri-Ace prêtera également sa vierge guerrière au jeu Lord of Vermillon, un cardgame exclusif au Japon.

 

Valkyrie Profile : Lenneth, divine idylle

 

Valkyrie Profile est unique en son genre. Ovni à son époque, il reste une très bonne expérience même aujourd’hui. Proposant une qualité d’écriture impressionnante sublimée par une direction artistique incroyable, le jeu possède un système de combat qui n’a pas pris une ride. Enchaîner les combos et les attaques spéciales est toujours aussi jouissif et la grande quantité de personnages jouables assure une replay-value presque infinie. Les suites, malgré leurs qualités, n’arriveront pas à reproduire le même exploit et après un spin-off sur téléphone portable, arrêté en 2020, la série disparaît totalement des radars. Il ne reste plus qu’à croiser les doigts pour un hypothétique Valkyrie Profile 3 : Hrist… Ou à (re)jouer à ce premier épisode !