À l’inverse de Final Fantasy qui a évolué peu à peu vers l’ARPG, il existe une série de Square qui assume ce genre depuis le début de sa création et cela a commencé en 1987 avec la série Seiken DensetsuLa légende de l’épée sacrée »), aussi connu comme la série « Mana » dans nos contrées.

Je vais tâcher, peu avant la sortie de Visions of Mana, de vous présenter la série, vous donner quelques repères et peut être attiser votre curiosité sur ces titres qui mérite votre attention.


Un début qui toussote :

La série "Mana" ou Seiken Densetsu - Partie 1
Artwork du dossier Excalibur

En 1987, Koichi Ishii rejoint Square qui a pour ambition de créer un jeu dans la veine de Wizardry (qui a inspiré de nombreuses licences de RPG) mais en plus « actif ». Square confiera alors au magasine Famitsu avoir lancé le projet « Excalibur » qui devait être une trilogie de RPG. Mais en octobre 1987 Square va finalement annuler le projet et rembourser les précommandes de celui-ci. Dans la lettre d’annulation, ils proposent à leurs futurs clients de finalement se rabattre sur le tout nouveau jeu sorti : Final Fantasy.

Mais heureusement, cela ne s’arrêtera pas là, et en 1991 Square va finalement utiliser la marque Seiken Densetsu (qui était le nom théorique de la trilogie de RPG prévu dans le projet) pour nommer un de ses jeux à sortir sur Game Boy, un ARPG créé pour concurrencer un bien nommé The Legend of Zelda.

Accrochez-vous, il y a eu quelques péripéties dans le nom puisque celui-ci se nomme au Japon : Seiken Densetsu: Final Fantasy Gaiden, aux Etats-Unis : Final Fantasy Adventure, et en  Europe : Mystic Quest. Donc pour comprendre la suite du nommage, sachez qu’il s’agit du Seiken Densetsu, premier du nom.

 

 

La série "Mana" ou Seiken Densetsu - Partie 1
Artwork du dossier Excalibur

Quand on jette un coup d’œil en arrière sur le premier épisode, on se rend compte que les bases de l’univers sont déjà quasiment toutes là. Seiken Densetsu, à l’instar de la saga Dragon Quest, va énormément réutiliser son bestiaire d’un épisode à l’autre pour remettre le joueur dans ses chaussons et profiter de l’amélioration graphique de ses monstres « choupinous » tout au long de la saga. Car Seiken Densetsu, bien qu’abordant des thèmes pas toujours tendres, fait dans le design kawaii. C’est une série que l’on peut aborder très jeune car très édulcorée. Point de sang ou de monstre à l’air dangereux, même un boss vampire aura plutôt l’air d’une chauve-souris docile qu’un monstre assoiffé de sang, à tel point que l’on peut avoir des remords à savater certains d’entre eux.

Elément très rare sur le marché de l’époque (et encore aujourd’hui dans ce style de jeu), Seiken Densetsu 2 et 3 (Secret Of Mana et Trials of Mana) permettaient de jouer les épisodes en coopération sur le même écran. C’est par cet élément que cette saga a marqué mon enfance car il s’agit du premier jeu réalisé en coopération avec mon frère à l’époque (et avec ma fille à présent lorsque j’ai préparé ce dossier). Je suis d’ailleurs triste que cet élément coopératif, force de la saga, ait pu disparaitre au cours du remake de Trials Of Mana et aussi absent de Visions Of Mana à venir.

 


Cartographie des épisodes de la série Mana

La série "Mana" ou Seiken Densetsu - Partie 1
Cartographie de l’ensemble des épisodes de la série

Les bases d’une histoire commune

Pour les personnes qui se posent la question, puis-je commencer par cet épisode ? Est-ce que je vais tout comprendre ? Rassurez-vous, à l’image de Final Fantasy, on va retrouver des codes communs à la saga mais il n’y a pas de chronologie/suite entre les épisodes. Vous pouvez commencer par celui que vous souhaitez !

 

 

La série "Mana" ou Seiken Densetsu - Partie 1
L’arbre Mana

Dans la base de l’univers on trouve des éléments fixes :

Un arbre Mana, source vivante de la Mana, l’énergie de la planète où se déroule votre aventure. Cette énergie sera souvent détournée par les antagonistes de l’épisode qui causera la déperdition de la Mana et de l’arbre.

On retrouve aussi l’épée de Mana, portant des noms différents selon la culture des peuples (Excalibur, Ragnarok …) mais qui, dans tous les cas, décrivent l’épée de Mana qui sert de catalyseur à l’énergie Mana (amusant car cela brise un peu le 4ème mur pour expliquer la traduction du nom de l’épée de Mana en Excalibur dans Adventure Of Mana aux US), elle sera portée par un « héros de légende » et servira à rétablir l’équilibre de Mana.

Les esprits élémentaires, ou esprits de Mana, qui devront souvent être libérés/découverts et serviront le héros dans sa quête. Selon l’épisode ils n’ont pas le même rôle dans le gameplay mais ce sont les représentants de la force magique de chaque élément.

Et on trouvera des personnages récurrents, un dragon ailé faisant partie de la légende, Watts le forgeron, des Chocobos et même des Mogs !

 


Seiken Densetsu I Aka : Adventure of Mana (US), Mystic Quest (FR)

La série "Mana" ou Seiken Densetsu - Partie 1


Comme indiqué dans l’introduction de ce dossier, l’épisode premier du nom parait, après quelques mésaventures de développement, par l’équipe en charge du dossier « Excalibur » en 1991 sur GameBoy au Japon et aux US et en 1993 en Europe. Il va utiliser la navigation par « écrans plats » présente dans Zelda mais avec un gameplay un peu plus centré sur les combats et moins dans les énigmes/puzzle. Cette construction par écran va perdurer dans de nombreux épisodes de la série.

 

Côté histoire, le héros, gladiateur-prisonnier, doit combattre des monstres dans une arène pour le plaisir sadique de l’empereur. Après la perte d’un être proche, il va s’enfuir et se retrouvera embarqué dans la quête de l’arbre Mana.

Bien que vous ne jouerez qu’un personnage unique, Seiken Densetsu va quand même introduire la notion de voyage d’un groupe d’aventuriers. Vous serez rapidement accompagné d’autres personnages importants de l’aventure qui vous aideront dans votre quête (vous lançant des sorts de soin par exemple).

Dans sa version initiale, Seiken Densetsu est un jeu assez punitif, un peu difficile à jouer aujourd’hui. L’héritage technique le plus marquant c’est le gameplay en 4 axes (pas de diagonale), vous ragerez régulièrement lorsque vous serez touché dans ces axes par les ennemis.

 

La série "Mana" ou Seiken Densetsu - Partie 1
Raté !

Cet épisode fera l’objet de deux nouvelles versions : Sword of Mana (Shin’Yaku Seiken Densetsu) en 2003 sur GameBoy Advance et Adventures of Mana sur Android, IOS et Playstation Vita en 2016.

Aventures Of Mana serait plutôt du côté du Remaster puisqu’il reprend toute la structure, les écrans de combat, l’histoire, et toutes les mécaniques du premier jeu. C’est d’ailleurs, la version que je vous conseille si vous souhaitez jouer au premier épisode de la saga, à peu près tel qu’il était, dans de bonnes conditions.

Sword Of Mana est lui, une refonte complète sur GameBoy Advance. Beaucoup plus proche de Secret Of Mana dans sa construction, il peux être considéré comme un épisode complétement différent dans la série mais suivant la même histoire. Une analyse détaillée de cet épisode sera proposée dans les prochaines parties de ce dossier.

 

 

NB : Aujourd’hui, il vous est possible de jouer à la version Game Boy dans la Collections Of Mana parue sur Switch. Cette compilation regroupe les jeux des « consoles d’origine » avec quelques subtilités.


Seiken Densetsu II : Secret of Mana (SoM)

La série "Mana" ou Seiken Densetsu - Partie 1

Le jeu qui transportera la série Seiken Densetsu dans une autre dimension et en fera une saga qui va compter. Secret of Mana figurera parmi les 100 plus grands jeux vidéo de tous les temps noté par IGN.

 

Sorti en 1993 au Japon et US et en 1994 en Europe, Secret Of Mana (Seiken Densetsu II au Japon) introduit la coopération en proposant 3 personnages jouables (membres obligatoires du groupe). Dans le cas où vous jouez seul, ou à deux, le(s) personnage(s) restant(s) seront joués par l’IA.

La série "Mana" ou Seiken Densetsu - Partie 1
Accessoire permettant de dépasser la limite des 2 joueurs dans de rares jeux.

Il s’agit d’ailleurs d’un des rares jeux qui pouvait tirer profit du multitap de la Super Nintendo et permettait de jouer jusqu’à trois joueurs en simultané sur la même console (vous pouvez également jouer à 3 dans la compilation Switch).

SoM va également apporter une nouvelle fondation à la série, le fonctionnement des « menus anneaux » qui mettront en pause les affrontements en temps réel pour vous permettre d’utiliser des objets, changer vos équipements, utiliser vos magies (ou même personnaliser l’IA des compagnons).

 

Le fonctionnement des combats se veut plus « technique » puisqu’une jauge de recharge à vos coups sera introduite. Lors d’une attaque, une jauge allant de 1 à 100% va se charger et il faudra attendre que la jauge soit « remplie » avec un petit signal sonore pour redonner un coup à pleine puissance. Pour bien comprendre : on peut donner un coup sans attendre la charge, mais il fera entre 1 et 4 de dégâts au début du jeu contre 18-21 à pleine puissance.

Et c’est là où Square réalise un coup de génie dans le système de combat, lorsque vous frappez les ennemis, il y a deux possibilités : si les dégâts sont suffisants, ils chuteront et pourront être attaqués de nouveau lorsqu’ils sont au sol, dans ce cas ils sont très vulnérables et il est facile de s’en défaire. Dans le cas de dégâts insuffisants, ils seront dans une autre position (clairement distingué par 2 animations différentes pour chaque ennemi) et ils seront invulnérables aux attaques. En sortie de ces 2 animations (au sol ou invulnérable), ils sont susceptibles de vous faire une attaque instantanément et vous pouvez vous retrouver vous-même au sol et vite être KO si d’autres ennemis se joignent à la fête.

 

La série "Mana" ou Seiken Densetsu - Partie 1
Dans la version SNES, en position « Hit » le monstre est immunisé, en « K.O » il peut accumuler des dégâts supplémentaires.

Vous devez commencer à voir où je veux en venir, si vous bourrez la touche d’attaque (sans attendre le 100%), les ennemis seront souvent invulnérables et vous risquez de prendre régulièrement des attaques en sortie de l’invulnérabilité. Il faudra donc jouer d’attaque « pleine », de recul pour ne pas se faire toucher (car il n’y a pas de touche d’esquive, il faut se déplacer hors des zones d’attaques et anticiper) et revenir à l’attaque pour mettre au sol l’ennemi. Il est aussi possible de charger des attaques spéciales au fil de l’évolution de vos armes donnant des animations très sympa (mais à l’efficacité discutable car le temps de charge est un peu long).

Graphiquement c’est un jeu plutôt flatteur pour la console. Le fonctionnement en ARPG et avec l’utilisation de navigation par « écran plat » permet au jeu de ne pas trop souffrir du temps. Si l’on ajoute une bande son absolument dinguissime pour l’époque par Hiroki Kituta on a un titre qui reste très agréable à parcourir aujourd’hui.

 

Si vous voulez découvrir Secret of Mana, je vous déconseille fortement le remake PS4. Je suis très déçu par cette version qui n’a rien compris au feeling des combats car, bien qu’ils aient conservé les 2 animations en cas de « gros coups » et « petit coups », les monstres ne sont jamais invulnérables, vous donnant la possibilité de les rouer de coups, déformant complètement l’expérience de jeu original. Sympa pour faire le jeu avec un enfant, ou un débutant, mais qui a réduit toute difficulté et sensation du titre car vous ne serez quasiment jamais touché. Décevant.

 

 

Relancer l’OST vous replonge immédiatement dans l’ambiance envoutante du titre.

Seiken Densetsu III : Trials Of Mana

La série "Mana" ou Seiken Densetsu - Partie 1

Sorti en 1995 sur Super Famicom, Trials of Mana restera disponible uniquement au Japon. Jusqu’à peu, il n’existait d’ailleurs aucun moyen (hors fantrad) de jouer à l’épisode autrement qu’en japonais. Cela explique l’engouement des fans pour la sortie de Collections of Mana, il s’agit de la première localisation et traduction officielle du jeu et dans sa version (un peu trop pure) de la version de la Famicom.

 

L’accueil sur le territoire Japonais n’atteint pas les hauteurs de Secret of Mana. Malgré une meilleure narration et des enjeux beaucoup plus engageant et proche des personnages joueurs, un graphisme amélioré et une bande son encore incroyable (toujours signée Hiroki Kituta), le jeu restera moins populaire que son aîné.


La série "Mana" ou Seiken Densetsu - Partie 1
Angela, un des protagonistes de départ.

Au lancement de l’aventure, vous devrez choisir 3 personnages jouables parmi 6 propositions pour  composer votre groupe. En fonction de l’équipe que vous allez constituer, vous aurez un rapport plus ou moins direct avec les différentes trames d’antagonistes. En effet, il y a 3 grands conflits en parallèle de la quête de Mana et selon vos personnages, vous pourrez avoir plus de compréhension et d’interactions vis à vis des affrontements en cours.

Le mode de combat évolue et on trouve des similarités dans des titres très actuels. Adieu l’attente des 100%, lorsque l’on donne un coup, on a une petite animation de recharge (très courte par rapport à la charge de SoM) et on a un rythme de frappe très rapide (les ennemis également). De plus, à chaque coup, vous chargez de l’énergie permettant, une fois la barre pleine, de lâcher une attaque plus puissante (tiens tiens, une « ATB » qui charge en faisant de petites attaques). Tout au long du jeu et de l’évolution de votre classe, vous aurez des animations de plus en plus impressionnantes lors de l’utilisation de la charge.

 

 

 

Malheureusement, quelques défauts se sont invités à la fête; difficile de ne pas mentionner l’inventaire comme un gros point noir. Pour l’utilisation des consommables et des sorts en combat, le menu en anneau de Secret Of Mana est toujours présent et fonctionne très bien. Mais pour une raison inconnue, le paramétrage de votre équipement, de l’IA … passe par un autre menu à la lourdeur inexplicable. Découpé en 6 écrans à l’utilité inégale, passer de l’un à l’autre fige presque le jeu durant une seconde rendant très énervant la navigation (surtout qu’on a du mal à mémoriser quel écran fait quoi).

 

La série "Mana" ou Seiken Densetsu - Partie 1
Le menu que vous détesterez.

Dommage également de ne pas avoir corriger les soucis de rythme des combats, dès que l’on utilise un sort, cela fige complètement l’action. Si vous spammez les sorts, l’action pour les personnages orientés « corps à corps » va être extrêmement hachée (tout comme dans SoM).

À l’inverse de son prédécesseur, l’évolution des personnages va pouvoir être personnalisée. Vous aurez des choix d’évolution de classe, certaines pouvant débloquer l’utilisation de sorts ou renforcer l’attaque. De même, lors de la montée de niveau, le jeu se fige et vous demande de choisir une statistique à améliorer. Malheureusement, Trials a conservé quelques soucis de conception, et l’Agilité (ou la dextérité selon la version) ne sert quasiment à rien (elle n’a aucun effet en combat et n’est utile que pour débloquer des éléments sur un seul personnage du jeu) et la chance n’augmente pas que le critique comme elle le devrait. Cela réduit le nombre de statistiques réellement utiles de 5 à seulement 3.

Et enfin, une des plus grandes incompréhensions de ce jeu, est que bien que le groupe se compose de 3 personnages jouables, Trials of Mana ne peut se jouer en coopération locale qu’à 2 joueurs ! Dommage pour le peu de foyer qui auraient réussi à investir dans le multitap pour l’opus précédent.

 

Nb : La Collections of Mana conserve l’ensemble des défauts de statistiques et de nombre de joueurs coopération, ainsi vous pouvez jouer à 3 à Secret of Mana mais seulement à 2 à Trials of Mana. À noter qu’il existe une rom hackée permettant de jouer à 3.

 

Avec une patte graphique encore plus belle que son précédesseur, le jeu reste parfaitement jouable dans cette mouture. Il est selon moi, le Seiken Densetsu coop « à l’ancienne » le plus accessible pour découvrir la série via la Collections of Mana sur Switch.

 

La série "Mana" ou Seiken Densetsu - Partie 1
La suite dans la partie 2 pour parler notamment du remake de Trials Of Mana.