Les samouraïs… Fiers guerriers japonais dont la maîtrise du katana et l’honneur envers leurs maîtres passionnent les joueurs depuis des générations. RPG, action, combat… On les retrouve dans de nombreux styles différents. Dès lors, il n’est pas étonnant que Square Enix ait lui aussi utilisé ces guerriers dans plusieurs de ses jeux. Ce Reset va être consacré à l’un d’entre-eux : Musashi Samurai Legend, que j’ai découvert récemment. Préparez-vous, le voyage n’est pas de tout repos…

 

Brave Fencer Musashi, l’ancêtre

Musashi Samurai Legend : l'action-RPG mou du genouAvant de parler de Musashi Samurai Legend, il convient d’évoquer sa « préquelle » Brave Fencer Musashi. Sorti sur PS1 en 1998 au Japon et en Amérique, le jeu vous proposait d’incarner Musashi, un jeune samouraï, qui se retrouve invoqué dans le royaume d’Allucaneet par la princesse Fillet pour y combattre l’empire Thirstquencher. Pour cela, notre héros devait récupérer 5 rouleaux élémentaires afin de renforcer l’épée Lumina tout en libérant au passage les habitants qui ont été capturés. Imaginé par Hironobu Sakaguchi en février 1997, l’action-RPG en 3D de Square connaîtra un succès critique et commercial lors de sa sortie. Il sera acclamé pour sa bande-son, ses graphismes, son gameplay mais également son écriture très drôle. Cela donnera des idées de suite à Square qui sera sans cesse repoussée jusqu’en 2005 et la sortie d’un nouvel épisode sur PS2.

 

On prend les mêmes et on recommence

Musashi Samurai Legend : l'action-RPG mou du genou7 ans, c’est le temps qu’il aura fallu pour  que Square Enix ressorte la licence de ses  cartons. Musashi Samurai Legend est sorti sur PS2 en 2005 partout dans le monde (le 9 septembre pour l’Europe). Cependant, ce n’est pas une suite mais plutôt une sorte de reboot/remake du premier épisode qui nous est proposée. Le jeu débute de la même manière que l’opus précédent. Le jeune Musashi est invoqué par Mycella, princesse des Mystiques, pour l’aider à sauver son peuple des industries Gandrake qui polluent la nature en exploitant le Nébulium, un minerai aux propriétés extraordinaires. Pour affronter Gandrake et retourner dans son monde, notre héros devra réunir 5 épées élémentaires, détenues par 5 prêtresses. Voilà pour la base du scénario qui vous est annoncée dans les premières minutes du jeu. L’histoire est très classique, sans aucune originalité. Les dialogues sont enfantins, les personnages stéréotypés au possible, les situations prévisibles…

Musashi Samurai Legend : l'action-RPG mou du genou
Un vrai tombeur…

Mais le plus gros défaut du scénario est sa linéarité et sa redondance. Vous passez votre temps à faire la même chose : vous découvrez une nouvelle zone, récupérez un artefact qui vous donne une nouvelle compétence (escalade, double-saut…) et libérez une prêtresse qu’il faudra porter et ramener jusqu’au village des Mystiques (nous reparlerons de ces phases d’ailleurs). Suite à cela, vous devez retourner dans la même zone pour cette fois affronter un boss et récupérer l’une des 5 épées élémentaires avant de passer à la zone suivante et répéter le même schéma… Cela finit par provoquer un désintérêt pour l’histoire qui heureusement est de courte durée, le jeu durant une quinzaine d’heure. Cependant si Musashi ne brille pas pour son écriture, il se rattrape sur d’autres points.

Musashi Samurai Legend : l'action-RPG mou du genou
L’une des 5 épées élémentaires

 

Mission sauvetage

L’une des (très) rares quêtes secondaires consiste à retrouver tous les habitants du village qui se sont retrouvés enfermés dans des sphères disséminées à travers le monde. Chaque nouvelle personne apportant de nouvelles options (forge, colisée, boutique…) les rassembler toutes est plutôt intéressant. Sauf qu’une fois de plus, l’équipe de développement a raté son coup, la quasi-totalité des Mystiques se trouvant en plein milieu du chemin. Aucune phase de recherche ne sera donc nécessaire pour accomplir cette mission qui au final n’a rien de difficile… Quand on sait qu’à l’époque étaient déjà sortis les trois premiers Ratchet and Clank qui offraient la quête des boulons d’or vous demandant de farfouiller dans les moindres recoins des niveaux, on ne peut qu’être déçus du manque de challenge proposé par le jeu.

Un gameplay efficace mais perfectible

Le jeu est découpé en 6 zones accessibles depuis l’Anthédon, une sorte de baleine volante géante, abritant le village des Mystiques. Limité au départ, le cétacé vous emmènera plus loin au fur et à mesure des épées récupérées. Chaque lieu a ses propres ennemis et mécaniques vous demandant souvent d’utiliser le pouvoir de l’épée récupérée dans la zone précédente. Il n’y a donc pas besoin de se creuser la tête bien longtemps devant les « énigmes » du jeu. Vous vous contenterez donc le plus souvent de parcourir des couloirs et des espaces un peu plus ouverts infestés de robots et ninjaroïdes à découper. Et sachant qu’ils réapparaissent au bout de quelques secondes, vous allez passer du temps à les combattre.

Musashi Samurai Legend : l'action-RPG mou du genou
La mappemonde à partir de laquelle vous choisissez votre destination

Outre les attaques simples à l’aide du katana et les coups plus lents avec les épées élémentaires, Musashi a accès à tout un éventail de techniques, offensives et défensives, qu’il peut voler à ses adversaires. Pour ce faire, vous devez cibler un ennemi et attendre que votre jauge de concentration se remplisse au maximum puis au moment ou votre adversaire lance son attaque, presser la touche carré pour l’apprendre. Si sur le papier l’idée est bonne, dans la pratique c’est un peu raté. Le timing est hasardeux et si vous avez le malheur d’être touché ou un peu trop éloigné de votre cible, le lock se désactive et il faut recommencer le remplissage… De plus, le fait de ne pouvoir s’équiper que d’une seule compétence à la fois limite leur utilité (et l’intérêt de toutes les récupérer). Mais le jeu possède une autre mécanique qui s’avère être crispante au possible : l’escorte des prêtresses.

Musashi Samurai Legend : l'action-RPG mou du genou
Pressez la touche carré à cet instant pour apprendre une nouvelle technique

À chaque fois que Musashi va retrouver l’une des 5 jeunes filles, il faudra la ramener au village en la portant à travers toute la zone. Vos déplacements, déjà assez lents, sont donc entravés et vous ne pourrez plus attaquer de manière efficace (même si le lancer de prêtresse fait de gros dégâts). La meilleure option étant donc de déposer la demoiselle avant de nettoyer la zone pour reprendre votre route. Ajoutez à tout cela des problèmes de caméra fréquents, des ralentissements en cas d’écran surchargé et une mollesse générale, et vous obtenez un gameplay qui devient vite ennuyeux sur de longues sessions…

Musashi Samurai Legend : l'action-RPG mou du genou
L’un des 5 boulets à transporter

La fin du jeu

Musashi Samurai Legend : l'action-RPG mou du genouJ’aimerai faire un petit aparté sur la fin. S’il est évident que celle-ci a été bâclée (la fin consistant en un texte sur fond noir…), j’ai surtout été surpris par les boss dans la dernière ligne droite du jeu. Capables de vous mettre KO en quelques coups, ils vous demanderont des réflexes et de l’observation pour être vaincus, là ou le reste du jeu pouvait se traverser en matraquant la touche d’attaque. Ce changement brutal de la difficulté a quelque chose de perturbant et peut entraîner de la frustration lorsqu’un énième Game Over apparaît suite à une parade ratée. Personnellement n’ayant plus de patience pour le jeu, j’ai battu le boss de fin en usant et abusant d’une technique ennemie rendant invincible. Moins classe, mais moins prise de tête.

Mais c’est joli quand même !

S’il y a bien un point sur lequel le titre fait un presque sans-faute, c’est sa direction artistique. Le character-design est signé Tetsuya Nomura qui adopte ici un style très « manga », très nerveux et anguleux. Les personnages ont tous un look très réussi qui colle parfaitement à leur caractère (mention spéciale à Clochette qui est sûrement le personnage le mieux écrit d’ailleurs). Style très bien mis en avant dans l’introduction animée réalisée par le studio Gainax (Evangelion, Gurren Lagann). Dommage qu’il n’y en ait pas plus d’ailleurs.

Musashi Samurai Legend : l'action-RPG mou du genou
Un extrait de la scène animée qui est plus dynamique que le reste du jeu !

Les décors sont chatoyants même s’ils manquent d’originalité. Les grands classiques du genre, volcan, forêt, caverne, nous étant resservis une fois de plus. Petit bémol toutefois pour le village des Mystiques dont la construction et l’aspect très simple ne mettent pas en valeur le repeuplement de celui-ci. Les effets de lumière flattent la rétine et le soin tout particulier apporté à la mort des ennemis est assez bluffant. Les corps se découpent en fonction de nos coups avant de se désagréger dans un nuage de particules du plus bel effet même aujourd’hui.

Musashi Samurai Legend : l'action-RPG mou du genou
Les ennemis se décomposant selon la direction de nos coups est vraiment un petit plus très sympathique

Si visuellement le jeu est donc très bon, on ne peut malheureusement pas en dire autant de la partie sonore. Les doublages anglais sont ratés et ne collent absolument pas aux personnages ou aux situations (exception faite de Clochette une fois encore). La bande-son est signée Masashi Hamauzu (Dirge of Cerberus, FF XIII, FF VII Remake) et Junya Nakano (Tobal n°1, FF X) et s’avère plutôt efficace avec ses sonorités principalement rock et electro. Cependant le mixage a été fait d’une manière très étrange si bien que les musiques sont très souvent inaudibles à cause des bruitages dont le volume est bien trop élevé… Il y avait pourtant de jolies pistes à découvrir…

L’influence de Final Fantasy VII

Le jeu est rempli de références au septième épisode de Final Fantasy. Les industries Gandrake rappellent fortement la Shinra. Toutes deux possèdent la même esthétique sombre, utilisent des robots en masse, et possèdent un conseil d’administration très semblable dans son fonctionnement. Quant au fait qu’elles exploitent toutes les deux les ressources de la planète (l’énergie Mako / le nébulium) et persécutent un peuple antique (les Anciens / les Mystiques), cela ne fait que renforcer l’impression de déjà-vu. Le jeu propose également des phases en véhicule, dont un passage en moto semblant provenir tout droit des aventures de Cloud.

Musashi Samurai Legend : l'action-RPG mou du genou                                    Musashi Samurai Legend : l'action-RPG mou du genou

Mention spéciale également pour le duel final qui reprend la même mise en scène que celui de FF VII. Cette inspiration se ressent jusque dans les artworks du jeu reprenant certains visuels iconiques du septième épisode. Sorti en plein milieu de la compilation Final Fantasy VII, la même année qu’Advent Children, Musashi Samurai Legend est rempli de clins d’œil à son aîné… à moins qu’il ne s’agisse d’une tentative d’attirer les fans… Ah et pour la petite anecdote, si Musashi et Gandrake (dont le vrai nom est Kojiro Ganryu Sasaki) rappellent Cloud et Sephiroth, les ennemis de FF VII sont eux-mêmes inspirés des personnages historiques Musashi Miyamoto et Sasaki Kojiro. La boucle est donc bouclée !

Musashi Samurai Legend : l'action-RPG mou du genou
Une statue représentant les Musashi et Kojiro historiques et une statuette des antagonistes de FF VII. Ressemblant, non ?

Un accueil en demi-teinte

On ne peut pas dire que le jeu fut un véritable succès à sa sortie. Moins de 100 000 copies vendues au Japon et des notes en demi-teinte. En France, Musashi écopera d’un 15/20 de la part de JVC qui a apprécié l’ambiance visuelle du titre malgré une jouabilité parfois ennuyeuse. Gamekult sera plus sévère avec un 5/10 dû au côté mou du jeu malgré une esthétique réussie. Le jeu finira avec un score de 64 sur Metacritic, ce qui est plutôt moyen. Il est intéressant de remarquer que contrairement à la presse, les joueurs ont été emballés par cet aventure lui attribuant de très bonnes notes… Peut-être était-ce dû à l’absence de gros action-RPG à l’époque ou à l’aura de Square Enix

Musashi Samurai Legend : l'action-RPG mou du genou
Le jeu est sauvé par ses visuels

Du coup, on y joue ?

Sincèrement je ne sais pas trop quoi penser de Musashi Samurai Legend… Le jeu a de bonnes intentions mais est perclus de petits défauts qui, cumulés, plombent l’ensemble. Il en ressort une impression d’occasion manquée. Alors que la direction artistique aurait dû me marquer, j’ai fini par me lasser de traverser les mêmes couloirs plusieurs fois. Plutôt que de retenir la musique, je suis resté bloqué sur les doublages plats et sans âme. Quant aux combats, qui sont le cœur du jeu, je ne garderai que le souvenir d’un héros lent et rigide affrontant des hordes de ninjas sans fin… Dès lors pourquoi les joueurs en gardent un si bon souvenir ? Est-ce leur âme d’enfant qui parle ? Seraient-ils aussi charmés qu’à l’époque s’ils y rejouaient aujourd’hui ? Des questions auxquelles je n’ai pas de réponses mais si les fans de la première heure pouvaient me répondre en commentaires, j’en serai ravi. Toujours est-il que je n’ai pas détesté Musashi mais de là à le recommander, il y a un pas que je ne franchirai pas. Peut-être si vous êtes curieux ou avez du temps libre pour tester l’un des premiers essais de Square Enix dans le domaine de l’action-RPG ou bien si le style cell-shading tout en couleur vous plaît particulièrement.

Musashi Samurai Legend : l'action-RPG mou du genou

 

C’est ainsi que ce termine ce Reset dédié à Musashi Samurai Legend. Un jeu plein de bonnes idées mais miné par ses défauts. Il mérite tout de même le coup d’œil pour son esthétique toujours aussi percutante, même 15 ans plus tard. Actuellement la licence semble oubliée par Square Enix qui, à l’exception d’une vidéo pour les 20 ans de l’opus original, n’a plus fait mention du jeu. Dommage pour notre jeune samouraï qui aurait pu devenir une figure de proue de l’action-RPG.