Roberto Ferrari et Final Fantasy Type-0 : anecdotes

Roberto Ferrari est un artiste italien installé au Japon à qui l’on doit bon nombre de designs de personnages dans l’univers de Final Fantasy, ainsi que sur d’autres licences de Square Enix. Ses principales contributions sont à retrouver dans Final Fantasy XV, Final Fantasy Type-0, Dissidia Final Fantasy et dans le remake à venir de Final Fantasy VII, aux côtés de Tetsuya Nomura qui en a fait une sorte d’héritier.

Si l’artiste s’est livré sur l’un des sites officiels de la série au sujet de sa collaboration sur le jeu de cartes officiel estampillé Final Fantasy (FFTCG), plusieurs anecdotes inédites (ou non) parsèment ses réponses et devraient intéresser le fan en général. Nous vous proposons donc une traduction des passages clefs.

NB : les passages avec une astérisque* sont des commentaires de la rédaction.

Roberto Ferrari et Final Fantasy Type-0 : anecdotes

― Vous avez produit de splendides illustrations tirées de Final Fantasy Type-0 pour le jeu de cartes Final Fantasy. Pouvez-vous nous en dire plus sur votre rôle lors du développement du jeu ?
Ferrari : J’étais chargé de concevoir les personnages en lien avec l’Oiseau Vermillon. Nous étions plusieurs artistes dans l’équipe et on nous avait demandé de trouver des idées pour représenter les différentes nations du jeu (Rubrum, Milites, Concordia et Lorica). Le coordinateur créatif, M. Nomura, ainsi que le directeur artistique, M. Naora, se sont ensuite penchés sur nos travaux et nous ont assigné à chacun de travailler sur telle ou telle nation. C’est comme ça que je me suis retrouvé avec Rubrum.

J’ai commencé en utilisant mon propre style avant d’incorporer quelques unes des excellentes idées des autres designers pour parachever mes travaux. Ainsi, même si j’avais la charge d’une seule nation, je n’étais pas tout seul pour concrétiser les concepts. Le résultat final est un mélange de toutes nos idées, de la même façon que mes propres idées ont été incorporées dans les illustrations des personnages des autres pays.

― La conception des personnages des diverses nations fut donc un travail d’équipe. Pouvez-vous nous décrire le processus type derrière la création d’un personnage ?
Ferrari : Pour chaque personnage, on nous donnait une simple description comme « c’est un personnage égoïste », et c’est de là que je suis parti. En ce qui concerne ma méthode de travail, je conçois plusieurs brouillons très variés que je propose ensuite au client, en l’occurrence MM. Nomura et Naora. Pour la couleur des cheveux par exemple, je dessine un personnage à la fois avec les cheveux bruns et avec les cheveux blonds ; je les laisse ensuite choisir ce qui s’approche le plus de l’idée qu’ils avaient en tête, et je pars ensuite dans la direction retenue.

Pour Kurasame, j’ai proposé des concepts avec des cheveux longs et avec des cheveux courts, et c’est la version avec les cheveux courts qui correspondait le plus à ce qu’ils en attendaient. La relation entre l’artiste et le client ressemble assez à celle entre un acteur et un réalisateur. L’acteur-artiste saisit les intentions du réalisateur-client, et les deux travaillent de concert pour créer l’œuvre.

― Quelle est l’idée directrice derrière ces illustrations ?
Ferrari :
J’ai tenté de rester proche des designs originaux pour Type-0. À l’époque, j’ai fait en sorte d’accorder mon style à celui de M. Nomura qui s’occupait alors des personnages principaux, ce qui est très différent du travail tridimensionnel requis pour les personnages de FFXV.

Je suis obsédé par les formes, donc tant que les formes sont bonnes, je ne ressens pas le besoin d’ajouter davantage de traits. La surenchère de traits permet de libérer l’imagination du spectateur, d’ouvrir la porte aux diverses interprétations. C’est une manière de faire, mais en ce qui me concerne, je m’attache à limiter le nombre de traits sur mes dessins pour n’aboutir qu’à une seule interprétation possible. Je me débarrasse de tout ce qui est superflu dans ma tête, et je construis le dessin pour le rendre fonctionnel en mouvement. Une chose pure, sans fioritures, c’est un concept magnifique. Quand je concevais des images pour FFXV, la consigne était de penser à ajouter beaucoup de détails. Comme je le disais, c’est une manière de concevoir les choses, mais à choisir, je préfère le genre de travail épuré que vous voyez ici.

― Sur quoi vous êtes-vous concentré pour représenter les personnages d’Arecia, Kurasame, Emina, Kazusa et Caetuna ?
Ferrari :
Je souhaitais dépeindre des scènes clefs de Type-0, que j’avais d’ailleurs sous les yeux pour l’inspiration. Je voulais aussi faire transparaître la personnalité de chaque personnage.

Roberto Ferrari et Final Fantasy Type-0 : anecdotes
Arecia (« Mère ») est un personnage fantastique. Elle se moque de l’avis des autres et s’attache à réaliser ce qu’elle a en tête, même si cela doit causer du tort à son entourage. Faire du violet sa couleur fétiche était mon idée. Le point auquel je tenais beaucoup était les reflets verts de ses cheveux, pour le contraste saisissant avec le violet. En tant que chef et mentor, je l’ai représentée comme si elle était en train d’observer tout le monde.
Roberto Ferrari et Final Fantasy Type-0 : anecdotes
Emina est un personnage difficile à cerner. Ses formes généreuses sont nées des désirs de personnels masculins de l’équipe de développement. Loin d’être un personnage franc dans ses intentions, je l’ai donc représentée de façon à ce qu’elle dégage une aura de mystère, de fourberie.

Roberto Ferrari et Final Fantasy Type-0 : anecdotes
Kurasame est un personnage raisonnable, mais il est aussi passionné et empreint d’un grand sens de la justice. J’ai fait apparaître dans ce son regard cette flamme qui bout dans son cœur.
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Caetuna dégage une aura mystique. Elle vit dans son propre monde, si bien que personne ne peut dire ce qu’elle peut bien penser. Mon illustration est un rappel de la scène d’invocation d’Alexandre, probablement la séquence à laquelle tout le monde pense quand on parle de Caetuna.
Roberto Ferrari et Final Fantasy Type-0 : anecdotes
Kazusa est un peu du genre « chercheur-fou », bien qu’au début de l’histoire on ne le voie que comme un homme séduisant. Ce sont ses yeux qui ont le plus évolué pendant sa conception. À l’arrivée, Kazusa a ce regard à la fois mystérieux et un peu soupçonneux.

― Avez-vous eu des opportunités depuis la sortie du jeu pour illustrer de nouveau ses personnages ?
Ferrari :
Malheureusement non, c’est pourquoi je suis reconnaissant envers l’équipe de FFTCG pour leur invitation. Les designs originaux ont été publiés dans des ouvrages comme les Ultimania, mais il n’y a jamais eu d’aperçus d’aussi près, de leur visage. Je souhaitais vraiment que ces détails puissent être appréciés.

― Quel est votre personnage préféré de Type-0 ?
Ferrari : C’est Kurasame. Ils en ont fait quelque chose d’incroyable à l’arrivée. J’ai réalisé combien un personnage évolue lors des phases successives : bien que j’aie conçu ses traits, il a fallu ensuite le modéliser, ajouter la voix ou encore l’animer avant de le considérer comme complet. Ma participation se limite à quelques pourcents seulement du total. Je considère Kurasame comme étant mon personnage préféré en prenant en compte tout le processus jusqu’aux touches finales.

― Est-ce que cette requête vous a posé quelques problèmes ?
Ferrari :
Pas vraiment, mais il m’a fallu un peu de temps avant de parvenir à mettre de côté mon style actuel pour retrouver celui que j’utilisais à l’époque.

― Quels sont les autres personnages de Final Fantasy que vous aimeriez illustrer ?
Ferrari :
Tous les personnages que j’ai conçus ! Ils sont comme mes enfants. Je préfère donc m’occuper des illustrations les mettant en scène plutôt que de laisser d’autres artistes s’en occuper. Sinon, de l’univers de Type-0 : Quon et Mutsuki, mais aussi Qun’mi — la l’Cie du Tigre Blanc, puisque c’est aussi l’un de mes designs préférés.

Roberto Ferrari et Final Fantasy Type-0 : anecdotes
*La facétieuse, légèrement colérique, maniaque des bombes Mutsuki, est donc l’un des personnages préférés de Roberto Ferrari.
Roberto Ferrari et Final Fantasy Type-0 : anecdotes
*La plantureuse Emina cache ses secrets un peu mieux que ses attributs féminins.

Roberto Ferrari et Final Fantasy Type-0 : anecdotes
*Quon, jeune érudit plutôt prétentieux, montrera les limites de son self control lors de Tempus Finis et se fendra même du « privilège » d’être l’un des rares personnages de la série à prononcer les mots Final Fantasy.
Roberto Ferrari et Final Fantasy Type-0 : anecdotes

Si de prime abord, le style de Ferrari peut sembler un peu passe-partout avec ses lignes propres et ses aplats sans fantaisie distinctive, il ne faut pas oublier qu’il est en l’occurrence avant tout un designer. Si Final Fantasy Type-0, ou encore Final Fantasy XV, dégage de la personnalité c’est en grande partie grâce à son concours. Sa rigueur vis-à-vis de la direction artistique, sa versatilité (à découvrir avec ses publications sur sa page Facebook) en font un personnage à guetter pour les fans de la série.

Ses justifications sont d’ailleurs intéressantes, et l’occasion d’en savoir un peu plus sur les méthodes d’un profil atypique (qui a gagné le droit d’être crédité aux côtés de Nomura) et pourtant si typique du paysage japonais avec son goût prononcé pour son esthétique « pop », et ayant contribué au patrimoine de cette précieuse série.

En attendant de découvrir son travail sur le remake de Final Fantasy VII, pourquoi ne pas évoquer lequel de ses personnages vous préférez ?

Roberto Ferrari et Final Fantasy Type-0 : anecdotes
Roberto Ferrari et Final Fantasy Type-0 : anecdotes
Roberto Ferrari et Final Fantasy Type-0 : anecdotes
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