Lundi 28 mars. Nous nous envolons vers Los Angeles grâce à l’invitation de Square Enix France qui souhaite faire vivre ce grand moment aux communautés au même titre que les grands médias. En compagnie de Final Fantasy World et Finaland, chacun y va déjà de ses petits et grands espoirs mais le dispositif interroge déjà. Il faut dire que l’éditeur japonais a vu très grand, et que les médias les plus influents ont été conviés à l’événement. SQEX a certainement bien plus à nous annoncer qu’une date de sortie qui n’est de toute façon plus qu’un secret de polichinelle. Entre temps, les leaks s’accumulent, des médias chinois alimentent YouTube de morceaux de trailers à la compression aussi détestable que la démarche. A titre personnel, je décide de n’en relayer aucun sur Final Fantasy Dream, et d’ignorer complètement ces fulgurances qui agitent Twitter et les forums spécialisés. Après bientôt 10 ans attente, il me parait inconcevable d’abîmer la fête pour quelques clics de plus.

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La foule se presse vers le Shrine Auditorium sous l’œil amusé d'Akio Ofuji.

L’arrivée au Shrine Auditorium est marquée par des files d’attente longues de plusieurs centaines de mètres où la foule semble déjà galvanisée. Akio Ofuji se tient à proximité et salue les fans venus faire le déplacement avec le sourire. Quand j’entre dans l’enceinte prestigieuse du théâtre, je prends conscience de l’ampleur du dispositif mis en place. Des personnalités influentes de l’industrie sont assises quelques rangs devant moi, et les journalistes s’agitent en bombardant de photos la scène encore emmitouflée dans son rideau rouge. Le show s’ouvre sur l’arrivée surprise de Hironobu Sakaguchi venu adouber ce qu’il considère visiblement comme l’héritier légitime d’un travail amorcé il y a bientôt 30 ans. Ne jamais se reposer confortablement sur les acquis de la licence, et ouvrir constamment de nouvelles perspectives. La maxime paraît lancinante, mais le rappel semble plus que jamais nécessaire au regard des réactions que suscite parfois ce quinzième opus.

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L'arrivée sur scène de Sakaguchi surprend toute la salle. La suite du show sera à la hauteur de l'effet de surprise.

Durant 75 minutes, les annonces vont se succéder à un rythme effréné, sans aucun temps mort ou introspections superflues. Si Final Fantasy XV ouvre le bal avec un nouveau trailer très attendu (ponctué du sublime Stand By Me repris par Florence + The Machine – SQEX a dû dépenser une somme folle pour s’offrir les droits de la chanson -), les véritables attractions d’Uncovered vont se dévoiler plus tard. Lorsque Gladiolus, Ignis, Prompto et Noctis troquent leurs modèles CGI pour ceux d’une série animée, la salle réalise à peine que Final Fantasy XV vient de s’offrir une nouvelle déclinaison.

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Brotherhood Final Fantasy XV est donc le sobriquet d’une série animée composée de cinq épisodes (et d’un sixième épisode bonus exclusif à l’édition collector du titre) et qui suivra nos héros durant leurs premiers émois face à Niflheim. Comme pour briser définitivement l’idée de l’arlésienne, SQEX frappe fort et annonce la disponibilité immédiate du premier épisode diffusé gratuitement sur YouTube. La dimension road-trip du titre semble bien se prêter à l’exercice de l’animé et le premier épisode offre un aperçu pertinent de la fameuse fraternité réclamée par Tabata depuis qu’il a repris en main la communication. Il faudra néanmoins attendre les prochains épisodes pour juger du véritable intérêt de l’exercice. La suite est déjà bien avancée puisque l’épisode 2 arrivera sur la toile courant juin, et les autres épisodes suivront rapidement.

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Sans transition, Lunafreya et Regis illuminent l’écran géant et ravissent le public. De manière encore plus inattendue, SQEX nous offre alors deux petites minutes de bonheur qui vont bouleverser nos certitudes sur l’ampleur du projet. Si plusieurs rumeurs évoquaient déjà l’existence d’un film connecté à Final Fantasy XV, la réalité est si belle que rien n’aurait pu vraiment nous préparer à cette baffe. Ni les fuites, ni le fameux « Versus Epic » annoncé par Tetsuya Nomura en 2013 et qui laissait déjà entendre que l’univers s’étalerait sur plusieurs œuvres.

D’une ambition folle, Kingsglaive Final Fantasy XV propose un deuxième niveau de lecture du titre éponyme avec une ambition technique renversante. La sublime réalisation couplée à un casting prestigieux (Lena Headey et Aaron Paul au doublage) font de ce projet surprise l’un des plus excitants qu’il nous ait été donné d’apprécier ces dernières années. Développé depuis plus de trois ans dans le plus grand secret et sous la houlette du prolifique Takeshi Nozue, le projet est déjà bien avancé puisqu’il débarquera sur nos écrans avant la sortie du jeu avec le soutien de Sony Pictures sans en passer par les salles obscures. On comprend mieux grâce à Kingsglaive les raisons qui ont motivé le changement de script, et notamment l’introduction qui devait originellement nous faire vivre l’invasion depuis l’intérieur. Les deux récits seront donc appelés à se répondre (et sans doute à se croiser), et l’arrivée d’un nouveau protagoniste majeur, Nyx, bouleverse encore un peu plus notre vision de l’univers. L’imagerie ultra occidentalisée (certains protagonistes comme Luna sont quasiment méconnaissables) démontre bien l’ambition de plaire à un public élargi et qui parle à chacun. La communication promet d’être rapide, et ce film d’animation devra batailler durement pour intéresser largement au delà de sa fabuleuse plastique.

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L'imagerie ultra occidentalisée démontre bien l'ambition de plaire à un public élargi et qui parle à chacun.

SQEX annonce également le futur mini-jeu emblématique de la licence, une simulation de flipper, Justice Monsters Five, qui arrivera sur mobiles prochainement. Une autre déclinaison moins anecdotique qu’il n’y paraît au premier abord et qui entérine la volonté de proposer une compilation d’envergure qui forgera « L’univers Final Fantasy XV ». Toutes ces œuvres sont pour Hajima Tabata autant de clés d’entrée pour apprivoiser l’univers, d’où la multiplicité des formats. Si les fans se jetteront évidemment sur chacun des projets pour patienter jusqu’au 30 septembre, SQEX doit aussi convaincre le grand public pour atteindre ses objectifs commerciaux. Multiplier les projets rend pourtant la communication plus difficile à canaliser, et tout l’enjeu sera pour l’éditeur japonais de mettre en lumière chacun des projets au bon moment pour que la compilation marque durablement les esprits. Si celle consacrée à Final Fantasy VII est venue surfer sur le succès de Cloud et sa bande, le contexte est cette fois tout autre puisque les différents projets sont conçus pour porter le jeu. Il y a donc un peu de folie dans cette aventure, et c’est ce goût du risque qui en fait tout le charme !

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Toutes ces déclinaisons sont pour Hajima Tabata autant de clés d’entrée pour apprivoiser l’univers du jeu.

Revenons à Final Fantasy XV et sa démo technique promise depuis … septembre 2014. Teasée de longue date, elle arrive dans un écrin totalement inattendu et surprenant à bien des égards ! Développée en deux mois par une petite équipe, Platinum ( de son petit nom) nous propose de suivre Noctis enfant dans un rêve chimérique en compagnie du facétieux Carbuncle. Hajime Tabata admet s’être inspiré de l’univers des Disney pour le développement de cette version d’essai, la première destinée au grand public. Au delà du format singulier, la technique est parfois prise en défaut et interroge à six mois de la sortie du jeu. Cette démo censée présenter le véritable visage de Final Fantasy XV étonne par ses choix. On imaginait SQEX fournir une version d’essai peaufinée à l’extrême pour séduire définitivement les joueurs hésitants, et voilà que l’éditeur s’embourbe dans un exercice de style risqué. La démo paraît inaudible pour le joueur non averti, et qui tombe "accidentellement" sur elle depuis le PSN ou le Xbox Live. Par ailleurs, le système de combat tire sa force de la coopération entre les membres de l’équipe, et de leurs interactions, si bien que l’absence des frères d’arme de Noctis paraît déraisonnable. Comment démontrer le potentiel du produit en lui ôtant ses principaux atouts ? Un message introductif expliquant brièvement l’objectif des développeurs n’aurait pas été de trop car Platinum n’a pas démérité, loin s’en faut !

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La démo Platinum nous propose de suivre Noctis enfant dans un rêve chimérique en compagnie du facétieux Carbuncle.

Cette démo recèle en effet mille et un trésors pour le joueur averti et curieux de se familiariser à l’univers du jeu, et capable de se projeter au delà du cadre imposé. Ces interrupteurs permettant de détraquer la météo ou de se grimer en automobile sont autant d’invitations à découvrir l’incroyable potentiel du Luminous Engine. On ne peut néanmoins s’empêcher de penser qu’Hajime Tabata a sans doute un peu surestimé la capacité de discernement du grand public qui risque bien d’hésiter avant d’engager une pré-commande largement encouragée dans l’écran-titre. Espérons que cela ne portera par trop préjudice au titre puisque l’équipe n’a pas l’intention de proposer une version updatée de la démo, et encore moins d’en offrir une autre. Les prochains grands rendez-vous de l’industrie, notamment l’E3, proposeront néanmoins du nouveau contenu jouable pour les visiteurs.

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Hajime Tabata prend la pose en compagnie d'Hironobu Sakaguchi, Yoshitaka Amano, et Yosuke Matsuda.

En rentrant d’Uncovered Final Fantasy XV, je n’avais qu’une hâte, consulter l’avis des joueurs, et vérifier que la liesse était partagée. M’assurer aussi que le déferlement de moyens mis en place allait servir de tremplin doré au titre et étouffer pour de bon les vieilles rengaines. Si le titre est parvenu à effacer son statut d’arlésienne, il doit désormais affronter de nouveaux défis et prouver au monde la cohérence de son univers, mais aussi rassurer sur un aspect plus technique. A l’aune des nouvelles informations connues, il est tentant de s’interroger sur la véritable nature de Final Fantasy XV. Le déferlement de trailers, et d’annonces rend la définition encore plus difficile à établir et il faudra du temps avant de s’approprier chacune des productions et d’en savourer leurs attraits respectifs. Quelques jours après le show, je reste encore ému par ce spectacle grandiose qui est venu récompenser neuf longues années d’attente. Le premier enseignement à retenir d’Uncovered est finalement que la "découverte" ne fait que commencer, c’est une certitude !

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Mes chaleureux remerciements à Square Enix France pour cette opportunité rare et à mes compagnons de voyage.